mars 8, 2015

Les racines, l’histoire et l’esclavage expliqués à mon grand.

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Sacha a lu l’année dernière « Léon » De Léon Walter Tillage. Ce livre nous raconte l’histoire de la ségrégation aux Etats unis dans les années quarante. L’histoire de cet adolescent qui a vu sont père se faire rouler dessus par des jeunes blancs, juste parce que ça les amusait. Mais Léon c’est aussi l’histoire du discours de Martin Luther King et des premiers espoirs du peuple noir.

Lorsque je l’ai lu à mon tour, j’ai d’abord été étonnée que mon enfant ait eu à lire ce livre dans le cadre de l’école. Non que je doutais de l’intérêt d’une telle lecture en classe mais plutôt par reflexe protecteur de maman. J’aurais tellement voulu lui épargner toute cette horreur passée.

Et pourtant, cela fait aussi partie de son histoire à lui, de l’histoire de son père et de ses ancêtres.

Et je me suis souvenue que depuis tout petit, je lui racontais l’histoire (dans sa version édulcorée) de son nom de famille. Une histoire d’esclave qui se termine bien, sur fond de royaume et de champs de canne à sucre. J’avais envie de la laisser ici dans la version qu’il connait maintenant, du haut de ses dix ans passés.

 

« Mon grand.

À L’époque de la traite des noirs, ton ancêtre, était le prince du royaume d’Oyo. Ce royaume à cheval entre le Nigéria et l’ancien Dahomey était peuplé de Yorubas, des hommes forts et robustes, particulièrement recherchés pour le travail dans les plantations du Brésil ou du Portugal.

Ton ancêtre a été vendu par ses oncles à un Brésilien. Il est parti avec un grand nombre d’autres hommes par la porte du non retour, tu sais cette grande porte de pierres roses sur l’immense plage de Ouidah, tu y est allé tout petit et je te l’ai montrée plusieurs fois en photo.

Ce que l’homme Brésilien ignorait c’est qu’il avait parmi les esclaves qu’il venait d’acheter le prince d’un royaume. Et ça c’était interdit dans les lois. Ça peut paraître étrange et paradoxal mais la traite des hommes était aussi soumise à quelques lois.

Au bout d’un certains temps, il affranchît le prince d’Oyo. Il put ainsi rentrer dans son pays. En souvenir de cette histoire, ton ancêtre pris le nom de celui qui l’avait rendu esclave puis affranchi. De cette histoire sombre, il est resté un nom qui chante et qui signifie « Paradis » . C’est celui que tu portes aujourd’hui. »

 

Connaître l’histoire, si horrible soit elle, en tirer les leçons pour qu’il puisse inventer un monde plus ouvert et tolérant. je crois qu’il a l’âge maintenant pour tout cela.

Il se passionne d’ailleurs pour Martin Luther King et Rosa Parks, j’avais envie de lui offrir ce livre découvert seulement la semaine dernière. Il avait envie de voir « Le marjordome », je me pose encore la question. Quand à « Twelve years of slave »Il me demandait hier s’il pouvait le voir,  je crois que l’on va attendre encore vingts bonnes années!! Les mots sont une chose, les images encore une autre. Il pose beaucoup de questions et je crois que du haut de ses dix ans il a du mal à croire que tout cela a réellement existé.

Nous avons beaucoup parlé de l’esclavage et j’avais envie de partager cela ci, parce que cela raisonne dans ses racines Franco-béninoises, je sais également que très bientôt avec les cours d’histoire il aura à « encaisser » bien plus encore. Alors pour être capable de lui expliquer les périodes les plus sombres, j’essaie de toujours lui montrer à quel point il faut garder espoir en l’homme. Et dernièrement on sait tous à quel point c’est primordial.

*** En photo, la plage de Ouidah, chargée d’histoire et d’émotion. J’y allais régulièrement et j’y ai emmené Sacha alors qu’il était petit. La porte de non retour est juste sur la droite mais je n’en ai que des photos papiers quelque part dans mes cartons. Si vous en avez la curiosité, vous pouvez la voir ici.***

Je vous souhaite une belle semaine, n’hésitez pas à me dire comment vous faites chez vous pour expliquer tout cela à vos grands, ou comment vous envisagez de le faire.

Je vous embrasse.

 

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11 commentaires

  1. Répondre Melo mars 8, 2015 à 11:31

    Ma mère avait commencé par l’abolition… J’avais 4 ans, c’est mon premier souvenir de toute ma vie. Mon frere et moi en haut d’un volcan, en Martinique, devant un panneau de la date de l’abolition et ma mere qui explique. Je n’ai que de vagues souvenirs de la conversation, mais elle m’a beaucoup marquee..

  2. Répondre Adeline Les petits cultivés mars 8, 2015 à 11:50

    Un peu comme toi j’ai toujours tout expliqué à Milian mais le problème c’est de trouver les mots et de séléctionner plus ou moins ce que je peux dire ou pas. Quand il y a eut le massacre chez Charlie Hebdo il a bien senti que j’étais vraiment mal, il me posait des questions et je lui ai expliqué simplement que charlie hebdo c’était un journal qui se moquait des gens qui en faisaient trop ou qui faisaient de grosses bêtises. Et que certaines personnes se sont senties très vexées, qu’elles n’avaient pas du tout envie de rire de tout ça et que du coup ils ont fait beaucoup de mal aux journalistes parce qu’ils n’étaient pas contents. Et surtout je lui ai dis c’est nul hein de faire ça. C’est pas parce qu’on est pas d’accord ou pas content qu’on doit faire du mal aux autres c’est complètement bete et vraiment méchant! Il m’avait dit mais ne t’inquiète pas maman pour nous protéger on va fabriquer un bouclier de Zelda, contre les méchants! Sa réponse m’avait tellement touchée. Gros bisous à vous et bravo pour ton article c’est vraiment bien de prendre le temps d’expliquer toutes ces choses la.

  3. Répondre Sheily mars 9, 2015 à 8:33

    Une histoire et une photo qui me parlent énormément. Ouidah est la ville d’origine des mes familles maternelle et paternelle. Toutes deux ont des noms à consonance portugaise ou anglophone. En revanche, ils n’ont jamais quitté le Bénin. Et c’est toujours avec émotion que je me retrouve devant la Porte du non retour.

  4. Répondre sysyinthecity mars 9, 2015 à 9:08

    J’ai aussi pensé de suite au Majodorme, ce film est bouleversant, je vais le faire regarder à mes enfants, car tout ceci n’est pas si loin et qu’il ne faut pas l’oublier. Ton livre je me le note, je pense que je vais essayer de le trouver, pour le film Twelve years of slave, il a l’air tellement dur, je ne leur ferais pas voir, même nous on a du mal !

  5. Répondre mybrouhaha mars 9, 2015 à 10:19

    Tu sais, quand je te lis je me rends compte que j’ai très peu appris à propos de l’esclavage à l’école, au collège ou même au lycée, du moins en cours d’histoire.
    Peut-être que les programmes ont changé depuis, du moins je l’espère, mais les cours d’histoire étaient tellement franco-français que finalement on en apprenait bien plus en cours d’anglais! Et en fait, c’est durant ma 1ere année de fac d’histoire que j’en ai appris le plus sur l’esclavage…
    Alors merci pour ton histoire. Comme Sacha est chanceux d’avoir une maman comme toi qui lui parle de ses origines.

  6. Répondre Cristina mars 9, 2015 à 3:27

    c’est magnifique que vous puissiez parler de tout ça…!

  7. Répondre fils de ritalechat mars 9, 2015 à 5:27

    J’ai vraiment du mal à croire que ça a existé

  8. Répondre Myriam mars 9, 2015 à 5:50

    En lisant ton texte, je pense immédiatement au livre de Rue du Monde ‘Martin et Rosa’. Tu peux le conseiller à Sachant sans problème. Il est parfait pour aborder la lutte pour l’égalité .

  9. Répondre Myriam mars 9, 2015 à 5:50

    En lisant ton texte, je pense immédiatement au livre de Rue du Monde ‘Martin et Rosa’. Tu peux le conseiller à Sacha sans problème. Il est parfait pour aborder la lutte pour l’égalité .

  10. Répondre mamanpoule mars 9, 2015 à 11:08

    Bonsoir,
    Comme ce post me parle. (instant 3615 ma vie désolée…)
    Mon père est un noir métissé. Il ne connait pas ses origines. Il forme avec ma maman un couple mixte. Ils ont eu à ce battre contre les préjugés de leurs familles et de la société. Aujourd’hui, ce n’est plus un homme en colère…
    Néanmoins, ce n’est pas quelque chose dont on parlait ouvertement à la maison. On m’a appris le respect et la tolérance. Pas forcement son histoire, ni cette histoire. Mon père regrette toujours que l’on ne regarde pas plus objectivement les faits historiques. Je me souviens de débats, discussions lorsque j’étais en 4ème et que je me posais des questions sur le commerce triangulaire. Beaucoup de choses sont passés par le cinéma aussi. J’ai regardé Malcom X, Amistad, Une saison Blanche et Sèche et d’autres. Même si c’était des films que je regardais en famille. Je ne comprenais pas cette violence. Je ne la comprends toujours pas… Comment peut-on accepter ça ? Qui sont ces personnes pour perpétrer de telles atrocités ?
    Je ne suis pas certaine d’expliquer tout ça de la même manière à ma fille. J’ai envie de lui offrir le monde dans sa diversité, sa beauté et toute la richesse qu’il a à nous apporter. Je ne lui cacherai pas que certaines personnes « abîment » les autres, mais ce ne sera pas mon propos principal.
    Si elle avait l’âge de ton fils, je crois que j’illustrerai mes propos avec « La couleur des sentiments »…
    Ce qui est sûre, c’est que c’est bien de lui expliquer. De nouer le dialogue sur ce sujet. Encore une fois, tu préviens des problèmes avec intelligence et finesse. 😉
    Bonne soirée

  11. Répondre mmembis mars 10, 2015 à 10:12

    Personnellement je n’ai pas du tout aimé 12 years a slave mais c’est un autre sujet… Ton histoire témoigne de beaucoup d’intelligence humaine… comme à chaque fois en fait ! Dire que si je suis venue sur le site aujourd’hui c’était pour découvrir ton look « on est pas que des mamans » !

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