avril 16, 2020

Chronique familiale d’une pandémie #11

Chronique pandémie
.

Comme D’habitude si vous avez envie de lire le début, toutes les chroniques sont rangées ici.

Mardi 14 avril. 31ème jour de confinement.

Je suis obligée d’aller voir les anciens post pour le décompte des jours de confinement. 31 jours déjà et autant devant donc.

Ce qui se dessinait depuis la fin de ma quinzaine covid-19 devient de plus en plus réel. Le déconfinement sera pour moi compliqué. Je prends les annonces du président complètement par dessus la jambe. Pour moi le 11 mai est illusoire. Vraiment ça n’engage que moi mais l’idée de remettre mes enfants en collectivité après ce que nous sommes entrain de vivre sera vraiment ardu. J’avoue avoir quand même une sorte de curiosité de ce qu’il se passera pour nous tous ces prochaines semaines. Wait and see comme ils disent outre manche, de toute façon je n’ai que ça à faire.

Enfin que ça à faire c’est vite dit. Je me suis lancée dans la couture de masques, pour aider, pour m’occuper, pour ne pas laisser inutilisé le stock précieux d’élastiques et autre matière première en tout genre. J’avais un peu la trouille ayant été malade mais c’était bête de penser comme ça. La production impressionnante de Tatie A. a fini de me convaincre.

J’ai eu pas mal de questions: j’utilise le tuto de l’atelier des gourdes. Et bien entendu je n’en vends aucun. J’aimerai pouvoir aider au maximum ma famille et le personnel soignant dans mon entourage, j’ai trouvé à force de recherche un groupe Facebook de couturières. j’ai proposé mon aide. J’ai lu que la ville avait acheté un gros stock de tissu, du fil et de l’élastique. J’ai lu aussi que Leclerc donnait à ce groupe de couturière des paquets d’élastique.

Tout ça me réconforte beaucoup. Occuper mes mains empêche mon cerveau de mouliner. Et en ce moment c’est ce qu’il me faut.

Mes seize pivoines sont impressionnantes. Je peux passer des heures à les contempler. Elle ne sentent pas bon mais elles sont si belles. Dès que je passe devant, je souris, dès que mon regard se pose sur elles je suis apaisée. chaque ouverture de bouton est un cadeau dans ma journée.

Quand le superflu devient indispensable, c’est là que l’on recommence à rêver.

En allant chercher le courrier j’ose ouvrir la porte de notre ancienne boite aux lettres. Ce que je vois me souffle. Neuf petits bec jaunes et tremblants. Neuf petites vies affamées, juste là, à côté de nous. Je suis soufflée. Je n’ai jamais vu ça. Quelle chance j’ai d’assister à ces naissances.

Nous recommençons les travaux du jardin. Il y a douze sac à jeter… Nous attendons la réouverture de la déchèterie… on écoule les sacs doucement. On prend la mesure des services restreints chaque jour. On saute de joie pour une lettre (merci Marjo!) On est retourné au début de l’autre siècle, avec un téléphone et du wifi en plus!

Je me suis pesée. Je n’ai pas pris un gramme. J’ai même dû perdre un peu. Incroyable mais vrai. Merci Dieu du Banana bread de m’avoir épargnée.

PS: tout le monde va bien.

Mercredi 15 avril. 32ème jour de confinement.

Ce matin nous écoutons Inter. Ali Rebehi parlent de nouvelles. C’est passionnant et j’ai très envie de lire ou relire celles de Maupassant. Une intervenante nous dit qu’il est un auteur parfait pour donner le gout des nouvelles aux enfants. En évitant bien sûr le Horla! La nouvelle est un exercice qui me plairait beaucoup je crois. J’écoute je n’en perds pas une miette…Je suis captivée et un invité nous parle d’un anecdote littéraire que j’ai voulu partager ici.

Pendant un repas entre amis au restaurant, Hemingway propose une mise de dix dollars à chacun et parie qu’il peut écrire un roman en six mots. Après avoir constitué la cagnotte, Hemingway nota « For sale: baby shoes, never worn » (À vendre: chaussures bébé, jamais portées) sur un bout de papier, le fit passer autour de la table et récolta ses gains.

Wikipédia.

Je pousse un cri. Je suis soufflée. La puissance de ces six mots, l’histoire qui jaillit en flèche, l’émotion, les épaules qui s’affaissent. Six mots bon sang. Juste à l’écrire j’en suis encore remuée.

L’atelier a explosé. Je sature d’un bordel qui d’habitude m’est familier et propice à la création. Programme de ma journée: le ranger. Je me demande quand même pourquoi le matin je suis pleine d’entrain et que je ne fais pas la moitié des choses que je prévois de faire. Il me faudra manifestement bien plus d’un confinement pour régler ce problème.

Journée difficile avec les enfants, ils sont complètement décalés, se couchent tard, se lèvent tard. Voilà deux jours que nous jouons à la bonne paye, de mauvaise grâce pour moi au départ et finalement je me surprends à aimer ça. Après une bonne mise au point dont j’ai le secret tout les monde a repli son pli. l’ambiance est meilleure.

Ici c’est simple, on est tous dans la même galère, nos concerts s’annulent tous les uns après les autres, nos vacances sont compromises, la reprise de nos boulot aussi, les économies s’amenuisent à vue d’oeil et pourtant il faut continuer de garder le moral. C’est ce que je fais chaque jour alors que je ne suis pas la plus optimiste de la famille. Bien sûr que c’est dur, bien sûr que c’est chiant à mourir et pourtant on est là tous les quatre. Alors autant ne pas foutre en l’air l’ambiance. Je crois que les enfants ont compris. Ils ont été drôles à mourir ce soir. C’est bon de les avoir dans ma vie (quand ils sont comme ça! aha!)

PS: Tout le monde est ok.

Jeudi 16 avril. 33 ème jour de confinement.

Nous passons la matinée chacun de notre côté. Rodolphe cuisines des nems, je couds, Violette parle au téléphone avec une copine et Sacha joue avec son pote Lenny. Nous avons je crois besoin de ces moments de solitude.

J’ai remarqué que la moindre petite joie devient un événement. Un coup de fil, une fleur qui s’ouvre, Coco qui ronronne dans mon cou… Et dans le même temps, le moindre grain de sable prends des proportion pas possible… L’horaire du drive qui m’échappe au dernier moment, une douleur dans le ventre, un mot plus haut que l’autre.

Le confinement exacerbe les sentiments.

Cette après midi, je sens que je ne tiendrai pas. Je me couche deux bonne heures. Je suis encore fatiguée parfois. l’épuisement me cueille toujours après la douche. c’est étrange.

Aujourd’hui ressemblent tant à hier. J’ai cousu, repris entièrement un jupe que j’avais faite deux tailles trop grande, j’ai repassé en regardant Outlander. Dieu que cette série est cucul, c’est parfaitement ce qu’il me faut en ce moment. Les heures filent vite aujourd’hui. Tant mieux.

Bientôt demain.

Ce soir après le repas nous avons pas mal rigolé en parlant de pets! Oui voilà j’avoue tout. On y est tous allé de nos bruitage à la bouche te nous avons fini par regarder avec un Violette hilare et un sacha dépité d’avoir de tels parents, des vidéos de pets aux infrarouges sur youtube. Ce confinement n’aura pas notre moral bordel!

PS: nous allons tous bien. Et chaque je remercie l’univers pour ça.

Article précédent Article suivant

Lire encore...

12 commentaires

  1. Répondre Bricole avril 16, 2020 à 8:16

     » Mais Martine ! Ce sont des petous d’adulte ! » (Pardon !)

  2. Répondre Anyo avril 16, 2020 à 8:44

    C’est si doux de te lire, de savoir que c’est différent chez chacun mais en même temps un peu pareil puisque nous devons tous apprendre à vivre cette nouveauté.
    Ici on dort beaucoup, puis on a mille projets et la sensation de ne rien faire mais quand on prend le temps de voir les nouveaux souvenirs que l’on se créer, on est heureux.
    Ça fait du bien de te lire aussi car depuis hier c’est un peu explosif ici. On manque de solitude je pense… on va se réinventer cela !
    Je vous embrasse tous les 4 et la multitude de petits êtres qui sont si bien chez vous !

  3. Répondre MarionZ avril 16, 2020 à 10:21

    C’est drôle, vous me faites pensez à ma maitresse de CM2, elle nous lisait en lecture « offerte » des nouvelles de Maupassant… J’ai détesté ça ! ^^ Je ne me souviens pas bien précisément lesquelles elle avait choisi pour nous mais je garde le sentiment d’avoir détesté l’ambiance étrange qui s’échappait des pages autant que j’adorais ce moment de lecture « passive ». J’aimais déjà lire et je me suis dit que la littérature d’adulte était bien ennuyante… à cause de Maupassant, j’ai bien cru que le plaisir de lire ne m’accompagnerait pas au-delà de l’adolescence… Et puis finalement… je me suis heureusement trompée. Aujourd’hui, c’est moi l’instit, il faudra que je repense à Maupassant…! Ce n’est pas toujours évident de faire lire les enfants, mais les faire écrire est pour moi encore plus périlleux, pourtant j’adore les petits jeux d’écriture, et si j’osais, je vous lancerai un défi, les contraintes libèrent parfois.. Mais je n’oserai pas, je préfère ne pas interférer, malpolie que je serais et observer de loin, une « nouvelle » éclore chez vous peut-être, par le même chemin qu’auront pris vos belles fleurs ! Vous avez tous mes encouragements 🙂

  4. Répondre Annelaboulette avril 16, 2020 à 10:24

    Tellement bon ce partage, ce Combat quotidien pour que le’moral reste au beau fixe. Merci, ça m apporte beaucoup dans le mien

  5. Répondre Lyloo avril 17, 2020 à 5:05

    Des jolies photos et un texte que je dévore à chaque fois 🤗 contente que vous alliez tous bien bonne journée

  6. Répondre Marjolaine Solaro avril 17, 2020 à 5:47

    J’étais chez toi, une fois de plus en lisant tes lignes… Et savoir que ma carte postée le 9 mars est enfin arrivée et la voir chez toi, je trouve ça magique. Bisous doux.

  7. Répondre MamaCami avril 17, 2020 à 8:28

    Quel plaisir tes mots et tes photos! Cette Coco jolie, ces pivoines somptueuses, ces oisillons tout neufs et le concours de pets 😀 Simon nous a fait le même concert mercredi soir justement et on a bien rigolé.
    Ce que j’aime (entre autre) chez toi c’est que tu es « vraie », entre poésie et franche rigolade. Et merci de continuer à faire vivre les blogs.
    PS : je me dis que je dois être très cucul car j’aime Outlander. Mais bon l’Ecosse quoi!!!

  8. Répondre Emily avril 17, 2020 à 9:19

    Oui c’est vrai le moindre petit truc devient un évènement, en négatif ou positif. Je ne supporte plus la moindre réflexion à la maison , et sortir me coûte aussi beaucoup à présent …
    Côté positif : quand j’entends la voix du tout petit garçon d’en face, mon coeur explose de bonheur, et c’est tous les après midi vers 15hs … lorsqu’il joue dehors, cherche des trésors, des cailloux, et parle au chat : « tu veux te faire caresser mon petit » avec sa toute petite voix d’à peine 3 ans : ).
    Regarder la glycine des voisins changer de couleur de jour en jour puis exploser de fleurs à côté du lilas. Me chouter au parfum du lilas … Imaginer les petits oisillons des Rouge-Queues qu’on a nourrit cet hiver : on ne voit plus les parents, ils doivent couver …
    Le temps suspendu – la vie – nous sommes vivants !
    Je t’embrasse !

  9. Répondre Sosobio avril 17, 2020 à 5:41

    Merci pour ces jolies chroniques… Je vais profiter du confinement à partir de dimanche matin… Là, je bossais comme aide à domicile. Mais dès dimanche, on va danser, rigoler, lire avec ma fille de 5 ans et ce sera CHOUETTE !!!
    Je vais te piquer l’idée de la carte postale je crois… A bientôt !

  10. Répondre Maud avril 17, 2020 à 10:19

    Encore de bien jolis mots sur cette période délicate, tu m’émeus souvent, je ris aussi de bon coeur à te lire. MERCI

  11. Répondre Std avril 18, 2020 à 5:12

    Vous ne devriez pas avoir peur. Si les écoles reprennent il faut y envoyer les enfants : essayer de les surprotéger ne sert qu’à les étouffer. Ce n’est pas une bonne idée et je suis sûre que vous n’avez pas envie de leur transmettre l’idée qu’il fait se méfier des autres ou que l’extérieur est dangereux

  12. Répondre Marina Tort avril 18, 2020 à 11:48

    Bonsoir,
    je vois que vous allez vers le mieux et j’en suis bien heureuse pour vous, a la fin du confinement vous devriez écrire un livre, de tout ce que vous avez vécu, car pour ma part je vous lis comme un livre mais avec la vrai vie. Bien heureuse aussi que tout le monde va bien.
    Pour ma part nous sommes trois que dis je quatre avec Max notre chat noir et blanc dans le confinement, nous avons une fille de 16 ans, et il est vrai que parfois il est dure de vivre les uns sur les autres, mais cela permet de nous rapproché, parfois je perd patience ou je pète une durite? oui cela m’arrive, j’ai des crises d’angoisses aussi, mais je ne les montres pas. Depuis le confinement j’ai repris le patchwork, et je fait des masques aussi mais pour ma famille seulement, Ma fille Léa trouve le temps hyper long bien qu’elle se couche tard et se lève tard, dans la journée a part être devant son ordi ou la télé ou bien au téléphones avec ses copines, on joue parfois a des jeux, on dansent, on se taquine. Par contre je suis contre la reprise du lycée pour le 11 mai j’ai sut la préservé , je n’aie pas envie de l’envoyer dans un bain de virus, on interdit l’ouverture des restaurants, des cinémas , mais on veux envoyer nos enfants a la mort, cela ne leur a pas suffit tous ces morts leur en faut il plus. Allez je vous laisse et j’espère vous lire a nouveau bises a vous et a votre famille

Laisser un commentaire